Par Julie Amadis
#IPEAVAEAFAF
le 22/04/17
"Le jeune décédé a été frappé par une grenade de gaz lacrymogène. Il a été frappé directement à sa nuque. Directement il est tombé. Il est mort sur le coup."
Le 10 avril la police d'Issoufou a assassiné un jeune étudiant en L3 Sociologie alors que le mouvement des étudiants et lycéens au Niger débutait.
Le syndicat des scolaires l'USN avait lancé un mot d'ordre de mobilisation pour protester sur les arriérés de bourses.
Alors que le syndicat dénombre 3 morts et 200 blessés, la Commission nationale des droits humains (CNDH) [pseudo ONG gouvernementale tenue en laisse] comptabilise 1 mort, 4 blessés graves et plusieurs dizaines d'autres blessés. 83 étudiants ont été mis en garde à vue et les forces de l'ordre ont détruit du matériel appartenant aux étudiants et à l'Université.
Les premières investigations indépendantes, effectuées par la Commission nationale des droits humains (CNDH) confirment une intervention très violente de la police, alors même que les étudiants étaient bouclés à l’intérieur de l’université et n’avaient pas commencé à manifester : « L’irruption des forces de l’ordre au sein du campus, en violation des franchises universitaires, s’est effectuée dans une violence qui n’a épargné ni étudiants, ni personnes étrangères au mouvement. Et le bilan est grave : un décès constaté à la morgue de l’hôpital national de Niamey, 4 blessés graves hospitalisés à l’hôpital national de Lamordé et plusieurs dizaines de blessés aussi bien dans les rangs des étudiants que des forces de l’ordre », écrit la CNDH. La commission déplore aussi « d’importants dégâts matériels, les portes et fenêtres des dortoirs des étudiants défoncées, des vols d’ordinateurs portables, de téléphones cellulaires, de portefeuilles et de motos, quatre boutiques incendiées par les jets de grenades lacrymogènes ainsi qu’une dizaine de véhicules des forces de l’ordre endommagés. A cela, il faut ajouter des poursuites systématiques des étudiants jusque dans les mosquées, facultés, restaurants et bibliothèques et 83 étudiants, dont 11 jeunes filles, gardés à vue. »Un étudiant nigérien qui, l'an dernier, était encore militant du syndicat l'UENUN (Union des Étudiants Nigériens à l'Université de Niamey) - syndicat qui a lancé le mot d'ordre de grève a répondu à mes questions concernant la mobilisation des scolaires et sur la mort de Malah Bagalé.
Le bilan dressé par l’UENUN recoupe en grande partie ces chiffres mais fait part de trois morts et 200 blessés. ».
Le Monde
Voici l'interview :
Comment a démarré la mobilisation des étudiants au Niger et quelles étaient leurs revendications ?
"C'est l'USN qui a lancé le mot d'ordre 112H de grève, arrêt des activités académiques et marche pacifique pour protester contre les arriérés de bourses . L'UENUN (Union des étudiants nigériens à l'Université de Niamey) dépend de l'USN et donc a suivi le mot d'ordre."
Les étudiants mènent-ils un combat anti Franceàfric anti impérialiste ?
"Les syndicats étudiants sont anti impérialiste. Nous partons de la logique Marxiste Léniniste. Nous défendons les intérêts matériels et moraux des étudiants et nous prenons des positions anti impérialiste aussi, par exemple sur Areva. Le Niger est exploité et le syndicat fait des déclarations anti impérialiste."Comment s'est déroulé le mouvement des étudiants et des lycéens ?
"Le 10 Avril, les forces de l'ordre sont entrées dans le campus vers 8H. Ils sont entrés dans les chambres.(Il m'explique que le dortoir est situé à l'intérieur de l'Université)
Leur intervention était illégale. Sans la levée de la franchise universitaire par le Recteur (c'est l'équivalent du Président d'Université en France), il est interdit d'entrer dans l'université. Leur action était donc illégale.
Ils ont attaqué les étudiants. Donc les étudiants, pour se défendre lançaient des pierres et les forces de l'ordre des gaz lacrymogènes. "
Donc les étudiants n'étaient pas en train de manifester quand ils ont été attaqués ?
Y avait-il des manifestations de prévues pour ce jour là ?
"Les étudiants n'étaient pas dans la rue le premier jour de mobilisation.
On ne part pas en marche immédiatement. Il y a un jour de réflexion avant où on fait des grands débats pour que chacun apporte sa contribution pour la lutte."
Et les lycéens ?
"Ils étaient dans la rue dès le début."
Les lycéens, ce sont des jeunes de quels âges au Niger ?
" Le lycée c'est de 17 à 20 ans.Comment est mort le jeune Malah Bagalé ?
On passe le bac à 20 ans.
Et, l'étudiant tué il avait 24 ans."
"Le jeune décédé a été frappé par une grenade de gaz lacrymogène. Il a été frappé directement à sa nuque. Directement il est tombé. Il est mort sur le coup.
Le gouvernement a refusé son corps."C'est-à-dire ?
" Le gouvernement voulait garder le corps et on ne pouvait pas l'enterrer tout de suite. Ça a été aussi un combat des étudiants pour pouvoir le récupérer. Il a été enterré le 17.
Et le gouvernement dit des contre-vérités. Il dit que Malah Bagalé est mort suite à une chute.
D'autres parlent de suicide alors qu'il a été tué !
Hier, le Président a reçu les parents du défunt. Il va leur donner des miettes pour qu'ils puissent se taire."
Des jeunes ont été emprisonnés aussi. Qui sont ceux qu'ils ont emprisonnés ?
"Au début, ils ont pris des manifestants (des lycéens et étudiants) dans la rue et à l'Université au hasard. Après ils ont cherché les responsables syndicaux. Ils ont été relâchés là maintenant."
Et les professeurs, quelles ont été leur réaction ?
"Oui, les professeurs ont fait une déclaration pour dénoncer les violences des forces de l'ordre et l'assassinat de l'étudiant."
Ont-ils participé à la mobilisation ?
Non
Comment ont réagi les étudiants face à l'assassinat d'un des leurs ?
"Les étudiants ont continué la lutte. Ils ont demandé le limogeage du ministre. C'est pourquoi, le ministre de l'enseignement a été muté au ministère de l'Emploi et du Travail. Les syndicats ont aussi demandé à ce qu'une enquête soit diligentée."
Est ce que la mobilisation est finie ? Y a t-il encore des manifestations ?
"C'est redevenu calme. Les revendications des étudiants ont obtenu satisfaction."
Après avoir tué Malah Bagalé et blessé de nombreux étudiants...
Après avoir menti sur les causes de la mort de Malah Bagalé ....
Après avoir sali la mémoire de ce jeune en sociologie en inventant toutes sortes de contre-vérités sur les raisons de son décès....
Issoufou a cédé devant l'ampleur du mouvement....
Toutes les revendications ont donc été satisfaites.
Le ministre de l'enseignement Mohamed Ben Omar n'est plus ministre de l'enseignement.
Les étudiants incarcérés ont été libérés.
Issoufou s'est engagé à diligenter une enquête sur les violences des forces de l'ordre et l'assassinat du jeune Malah Bagalé.
Les étudiants vont recevoir leurs bourses d'étude et des travaux vont être réalisés pour améliorer les salles de cours.
Mais dans un pays où le salaire moyen est de 25 €/mois,
l'aboutissement de petites revendications comme celles ci n'est qu'une toute petite goutte d'eau...
Pour que le torrent d'eau arrive, il faut un combat plus large et qui soit révolutionnaire. Il est indispensable pour cela que les Nigériens mettent en place les CDR de Sankara, qu'ils se choisissent leurs propres représentants, des délégués révocables.
Issoufou sait bien cela, Areva et les dirigeants français aussi ... Il sait que même s'il est soutenu par la Franceàfric, son sort pourrait bien rejoindre celui de Blaise Compaoré sous la pression de son peuple.
C'est pour cela qu'il a voulu empêcher que tout le pays ne s'embrase et que les jeunes majoritairement sankaristes ne reprennent le véritable programme de leur héros, les CDR...
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