jeudi 11 août 2016

Pendant 61000 ans les humains ont partagé toutes les richesses : un temps 6,7 fois plus long que celui de l'inégalisme



Par Julie Amadis
#IPEAVAEAFAF
Le 09/08/2016


L'égalisme a duré six fois plus longtemps que l'inégalisme dans l'histoire des humains.


Nous sommes tous de la même espèce. Nous avons donc tous les mêmes besoins pour vivre, un toit, de la nourriture en quantité à peu près équivalente (une infime différence selon la morphologie des individus), d'être soigné quand on est malade, d'outils pour créer, innover, fabriquer.

A partir de l'apparition de l'homo sapiens sapiens (l'homme moderne) jusqu'au début du néolithique c'est-à- dire pendant une période de 61000 années, les humains vivaient de chasse et de cueillette en nomade.

Durant ces 61 siècles. les humains partageaient tout, la nourriture, l'habitat, les outils... Celui qui avait un talent pour sculpter ou faire des outils efficaces ne possédait pas d'abris plus grand ou des vêtements plus luxueux ... Celui ou celle qui avait découvert une plante efficace contre la douleur ne pensait pas mériter plus que ses congénères pour autant... Le plaisir d'être utile aux autres suffisait à leur bonheur.

Ces sociétés étaient égalistes. Ce qui était produit était partagé en parts égales entre les membres des groupes.


Cette période d'égalité et de partage a duré  6,7 fois plus longtemps dans l'histoire des êtres humains que la période d'inégalisme et de compétition dans lequel nous vivons actuellement.

En plus d'être égalistes, les sociétés du paléolithiques étaient pacifistes.
Les historiens n'ont retrouvé que très très peu de squelettes avec marques de coups. Marylène Patou-Mathis reprend et synthétise les travaux archéologiques entrepris qui prouvent que les hommes préhistoriques étaient pacifistes. Son article s'intitule "Non, les hommes n’ont pas toujours fait la guerre"

"Si, aujourd’hui encore, dans l’imaginaire populaire, les hommes préhistoriques apparaissent comme des êtres en perpétuel conflit, la réalité archéologique autorise à porter sur eux un tout autre regard. L’analyse des impacts de projectiles sur les os humains, des blessures, de l’état de préservation des squelettes et du contexte dans lequel ils ont été découverts permet de caractériser un acte violent. Actuellement, les plus anciennes traces de violence ont été observées dans un contexte particulier, celui du cannibalisme. Plusieurs preuves archéologiques attestent cette pratique, durant le paléolithique,
mais peu témoignent de la mise à mort des individus consommés. En outre, il est impossible de différencier les groupes d’appartenance des « mangeurs » et des « mangés ».
Quant aux autres marques de violence, l’examen de plusieurs centaines d’ossements humains datant de plus de 12 000 ans a permis de constater leur extrême rareté (9)."

Pour être plus précis encore : "Ces marques de violence n’ont ainsi été observées que sur cinq des deux cent neuf individus découverts sur des sites du sud-ouest de la France. Cf. Mary Ursula Brennan, « Health and disease in the Middle and Upper Paleolithic of southwestern France : A bioarcheological study », thèse de doctorat, université de New York, 1991."
Les hommes préhistoriques vivaient harmonieusement, en paix.


Les inégalités ont commencé à exister au début du néolithique.

LES CHASSEURS CUEILLEURS SONT ÉGALITARISTES
A LA DIFFÉRENCE DES SOCIÉTÉS D'AGRICULTEURS
 (A PARTIR DE 9000 av notre ère)

Jared Diamond constate que les chasseurs cueilleurs partageaient tout, à la différences des agriculteurs apparus à partir de 9000 av notre ère.

« Les sociétés de chasseurs-cueilleurs sont relativement égalitaires, manquent de bureaucrates à plein temps et de chefs héréditaires, et possèdent une modeste organisation politique au niveau du groupe ou de la tribu. Et cela du fait que tous les chasseurs-cueilleurs valides sont obligés de consacrer une bonne partie de leur temps à la quête de nourriture. A l 'opposé, dès lors qu'il est possible de stocker des aliments, une élite politique peut prendre le contrôle des vivres produits par les autres, affirmer son droit de prélever des impôts, ses soustraire à la nécessité de se nourrir elle-même et se consacrer entièrement aux activités politiques."
Il explique l'absence d'inégalité par l'absence de stockage de la nourriture. Quand il y a des stocks de biens, il y a des voleurs et se crée une élite qui se propose de protéger les stocks. Les inégalités entre les humains naissent.

Brian Hayden fait le même constat que Jared Diamond concernant l'égalisme au Paléolithique. La compétition entre les individus va de pair avec l'inégalisme. C'est pour cette raison que les sociétés de chasseurs cueilleurs égalistes ne connaissaient ni la compétition ni la hiérarchie entre les gens.

"Dans les sociétés de chasseurs-cueilleurs les plus simples, on est seulement capable d'exploiter des ressources limitées, susceptibles de s'épuiser en cas de surexploitation, telles le gibier de moyenne ou de grande taille. Du coup, ces sociétés ont des effectifs peu élevés et sont très mobiles ; le partage y est de règle ; la propriété et la possession de ressources en propre y sont rares ; elles sont dépourvues d'objets de prestige et n'accumulent pas de richesse ; elles ignorent la compétition économique ou la hiérarchie sociale et le stockage n'y est pas pratiqué."p 197 198 Brian Hayden sous la direction de Sophie A.de Beaune, Chasseurs-cueilleurs, CNRS édition, 2007

"Posséder un bien" n'a pas de sens pour l'homme préhistorique. Pour lui, ce qu'il produit appartient à tous les membres de la tribu. De même ce qu'il découvre, crée appartient à tous les humains.

Il est heureux de transmettre ses découvertes et son savoir aussi bien aux autres membres de la tribu qu'à la future génération qu'aux autres tribus qu'il rencontre lors de ses voyages.


C'est comme cela que l'art Magdalénien s'est répandu dans toute l'Europe. Les sculptures de Vénus ayant des caractéristiques similaires se trouvent dans de nombreux sites archéologiques de la Russie à l'Espagne. C'est donc que ces populations nomades se transmettaient leur savoir faire.

COMMENT DES SOCIÉTÉS EGALISTES SONT-ELLES
DEVENUES ESCLAVAGISTES ?

Les inégalités entre les êtres humains sont apparues au Néolithique et se sont aggravées considérablement lorsque ces mêmes sociétés ont grossi démographiquement et sont devenues des cités Etat.


D'après Jean Paul Demoule, c'est le mode de vie des sédentaires agriculteurs qui a gagné petit à petit toute la planète.

«  Aujourd'hui, les sociétés ayant adopté la domestication des animaux et des plantes ont imposé partout leur mode de production. Le contrôle accru de leurs ressources alimentaires leur a permis de se sédentariser et de croître indéfiniment en nombre. Elles comptent désormais plusieurs milliards d'individus, en constante augmentation, concentrés pour la plupart dans de vastes agglomérations urbaines. Le progrès continu des techniques leur permet, en principe, de nourrir de plus en plus d'individus et de développer des outils de plus en plus complexes, en particulier dans la gestion et la communication d'informations toujours plus nombreuses." (p 11 Jean – Paul Demoule La révolution néolithique)

Et ce mode de production est apparu en 9000 avant notre ère.

«  Peu de temps après, entre 9000 et 5000 avant notre ère, les premiers essais de domestication des animaux et des plantes apparaissent en plusieurs points du globe, de manière indépendante, chaque fois avec des espèces biologiques différentes. » (p 9 Jean – Paul Demoule La révolution néolithique)

Le mode de production agricole et le mode de vie qui l'accompagne s'étend rapidement et colonise l'ensemble de la planète.

« Une fois mis en place, le néolithique s'étend rapidement, du moins quand il dépend d'une plante fondamentale, qu'il s'agisse selon les régions, du blé, du riz, du mais ou du sorgho. L'avantage démographique conféré aux populations qui l'adoptent conduit celles-ci à coloniser de nouveaux territoires, repoussant ou absorbant les populations indigènes de chasseurs-cueilleurs et imposant sans doute aussi leur langue. » p 121 Jean – Paul Demoule La révolution néolithique

Ces espaces où résidait un mode de vie d’éleveurs agriculteurs deviennent de gros villages puis des cités états. Ces organisations humaines sont hiérarchiques et inégalitaires.

« Quand aux zones néolithiques originelles elles débouchent, à leur tour, à des vitesses variables, sur des formations étatiques et urbaines, l'aboutissement de ce processus ayant été fortement affecté par la colonisation européenne d'une grande partie de la planète, à partir du XVI° siècle de notre ère ». p 122 Jean – Paul Demoule La révolution néolithique
L'esclavage a alors vu le jour. Des hommes devenaient "propriétaires" d'autres hommes. Les premiers pouvaient s'allonger au milieu d'un faste de nourritures pendant que les second trimaient épuisés et sans rien dans le ventre.
En 2016, l'esclavage existe toujours en ayant néanmoins perdu son statut juridique de "propriété".
Le modèle "agricole" sédentaire a conquis le monde et s'est imposé partout. Souvent par la violence comme en Amérique du Nord avec les Awaniens.

LES SOCIÉTÉS LES PLUS GUERRIÈRES ET INÉGALITAIRES ONT CONQUIS LA PLANÈTE


 DEPUIS 9000 ANS LES DESTRUCTEURS D’ HUMANITÉ GAGNENT

C'est donc le modèle inégalitaire et compétitif qui a gagné contre le modèle de l'entraide et du partage.
C'est aussi le modèle violent et guerrier qui a gagné contre le modèle de société pacifiste.

Les Européens qui ont développé le modèle néolithique ont décimé les habitants de l'Amérique qui vivaient toujours en chasseurs cueilleurs et n'avaient eu de « révolution néolithique ». Ils vivaient en harmonie avec la nature qu'ils vénéraient et donc respectaient totalement à la différence des Européens.

Lire : Ils ont exterminé 95 % des Awoniens (Indiens d'Amérique, enfants d'Awonawilona)


Les Européens agriculteurs ne respectaient ni la nature ni l'humain.
Peut-on respecter l'humain quand on ne respecte pas la nature ?

Alors que les Amérindiens ou Awoniens tout naturellement cherchaient à partager leurs savoirs, les européens eux cherchaient à détruire le savoir de l'autre.
On a deux conceptions de l'humanité, les uns partagent le savoir ancestrale les autres détruisent les humains qui ne leur ressemblent pas.


Certaines civilisations qui n'ont jamais cessé de fonctionner sur le modèle des chasseurs cueilleurs existent encore mais elles sont minoritaires. Ces sociétés ont résisté à l'autre modèle parce qu'elles étaient situées dans des zones géographiques difficiles d'accès ou hostiles.

« C'est seulement dans les régions où des barrières géographiques et écologiques particulièrement fortes ont rendu très difficiles l'immigration de producteurs alimentaires ou la diffusion de techniques de production localement appropriées que les chasseurs cueilleurs ont pu persister jusque dans les temps modernes dans des régions propices à la production alimentaire. Les trois exemples les plus frappants sont la persistance de chasseurs-cueilleurs indigènes en Californie, séparés par des déserts des indigènes cultivateurs de l'Arizona ; celle des chasseurs cueilleurs Khoisan de la région du Cap, en Afrique australe, das une zone de climat méditerranéen peu propice aux cultures équatoriales des paysans Bantous voisins ; et celle des chasseurs cueilleurs du continent australien que des mers étroites séparent des producteurs alimentaires d'Indonésie de la Nouvelle-Guinée. Ces rares peuples restés chasseurs cueilleurs jusqu'au XX° siècle ont évité leur remplacement par des producteurs de vivres parce qu'ils étaient confinés dans des régions arctiques. Au cours de la dernière décennie du siècle ils auront eux aussi cédé aux attraits de la civilisation se seront établis sous la pression de bureaucrates ou de missionnaires ou auront succombé aux germes. P115 Jared Diamond

Le terme "prédateur" souvent utilisé pour qualifier les chasseurs cueilleurs est une insulte à ces peuples nomades qui n'ont cessé de respecter la nature.
Jean-Paul Demoule en fait la remarque.

« En ces débuts, le XX° siècle a qualifié de « prédateur » ce mode de vie traditionnel , par opposition à l'économie dite « de production » qu'aurait introduite la domestication des animaux et des plantes. Mais sur la fin, ce même siècle a commencé à se demander si lui-même ne pratiquait pas une prédation à plus grande échelle encore, au point de menacer la plupart des espèces biologiques, y compris peut-être l'espèce humaine. » (p8) Jean – Paul Demoule La révolution néolithique

En effet l'Europe a colonisé la totalité de la planète avec sa société d'inégalisme destructrice de la planète. Avec ceux qui ont accentué l'esclavage aux Amériques, les inégalistes ont détruit notre belle planète. Avant hier, la presse révélait que nous vivions à crédit car nous avions déjà utilisé toutes les ressources que la planète pouvait nous offrir.

Depuis cette nuit, la Terre vit sur ses réserves

Et nous avons 740 milliards de tonnes de carbone au dessus de nos têtes ce qui crée un couvercle carbone. Le climat se modifie et les accidents naturels se font de plus en plus fréquents.


Lire : Couvercle carbone, les faits, les chiffres


Moins de 10 % de la population mondiale détient 83 % du patrimoine mondial, alors que 3 % vont à 70 % des habitants. L’Amérique du Nord et l’Europe en possèdent 65 % (Observatoire des Inégalités)
Ce qui a pour conséquence de faire mourir
 cinq millions d’enfants de faim chaque année.
Ce qui amène Jean -Paul Demoule à conclure à propos du modèle agriculteur eleveur inégaliste qui a conquis toute la planète :


"Mais ces sociétés contemporaines se portent-elles bien ? On estime qu'environ dix mille enfants meurent chaque jour des conséquences de la misère et de la faim ; qu'environ trente millions d'humains au moins sont morts de manière violente depuis le dernier grand conflit mondial. » (p 11 Jean – Paul Demoule La révolution néolithique)"
La survie de l'humanité dépend de notre capacité à mettre fin au système inégaliste et destructeur de la planète. Reprenons les fondamentaux des chasseurs cueilleurs, l'égalisme et le respect de la nature et construisons un monde égaliste humaniste.

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